Le nouveau modèle de développement et la place de la résilience au changement climatique

Le nouveau modèle de développement marocain “(NMD)” se présente comme étant est rapport contenant les grandes inflexions souhaitables et les initiatives concrètes pour adapter le modèle de développement, et permettre une croissance globale et inclusive, qui place le citoyen au cœur de ce modèle. Ce NMD est le reflet parfait de ce que déclare les plus hautes autorités du Maroc comme objectifs et permet également de comprendre en surface les moyens qui sont ou seront mis en place dans la réalisation de ces “grands axes”.

Le Maroc d'aujourd'hui et du monde à venir

• Le NMD se veut comme une réflexion globale et multidimensionnelle comprenant l’environnement parmi ces piliers stratégiques majeurs. Le Royaume affirme avoir déjà lancé plusieurs programmes ayant trait à la préservation de la biodiversité, des ressources hydriques et à la lutte contre la pollution et le changement climatique. Les provinces du Sud ont été particulièrement ciblées dans ces nouvelles mesures, en convergence envers les cibles Objectifs Développement Durable 2030, placées en avant de ce développement.

• Le CSNMD (comité spécial sur le nouveau modèle de développement) reconnaît néanmoins qu’il y a de fortes pressions sur l’environnement, en particulier sur les ressources d’eau et la biodiversité. Ces stress sont notamment dûs aux changement climatique mais aussi à de politiques et de stratégies sectorielles ne tenant pas compte des impératifs de durabilité des ressources et des équilibres environnementaux.

• La faible intégration des contraintes environnementales dans les projets et politiques publiques a généré de fortes externalités négatives, dont le coût est estimé, selon plusieurs évaluations nationales et internationales, autour de 3% du PIB.

• Le Maroc est dans une situation de stress hydrique, ce qui reflète la vulnérabilité du pays au changement climatique face à des usages d’eaux n’intégrant pas sa rareté. La tarification de l’eau potable, industrielle ou d’irrigation ne traduit pas son coût réel et ne favorise pas le recours aux ressources alternatives.

• Le changement climatique pourrait aussi accentuer le déplacement forcé des populations des zones rurales arides vers les centres urbains, notamment sur le littoral. Ce littoral, qui abrite l’essentiel des activités économiques et humaines du pays, est exposé à des risques climatiques extrêmes.

• En dépit des enjeux encourus, les actions menées par le Maroc en termes d’adaptation demeurent limitées, comme en témoignent les retards dans la prise en compte des impacts environnementaux dans les projets et programmes publics, ou encore le développement embryonnaire de l’économie circulaire.

• Tenant compte de ces tendances, la concrétisation des engagements de notre pays au titre de l’agenda de l’ONU relatif aux Objectifs de Développement Durable (ODD) à l’horizon 2030 serait difficile, en l’absence d’une réelle inflexion de la trajectoire de développement. Nous présentons encore bien trop de lacunes en ce qui concerne la réduction des inégalités sociales, notamment entre les territoires et les genres. Nous devons aussi promouvoir un modèle de croissance économique décent, notamment pour les jeunes et les femmes, et enclin à la préservation de la biodiversité et la lutte contre les effets du changement climatique.

• Le monde étant de plus en plus sensible aux conséquences du changement climatique, les normes environnementales et écologiques deviennent centrales dans la production de biens et des échanges internationaux. Elles imposent à notre pays de réduire l’empreinte carbone pour ne pas subir de limitation de son offre exportable. Ceci rend nécessaire d’investir pour produire selon ces nouvelles normes, et pour en faire un nouvel avantage comparatif et un facteur de différenciation compétitive. En lien avec la prise de conscience des enjeux climatiques, le paysage énergétique mondial connaît également une reconfiguration profonde, avec l’essor important de l’énergie verte, et le lancement de vastes programmes d’énergie renouvelable notamment en Europe à travers le Pacte vert pour l’Europe. Cette tendance conforte les priorités du Maroc dans ce domaine, et appelle à consolider le pari des énergies renouvelables en investissant dans des projets et des choix technologiques adaptés et à fort impact sur la compétitivité.

 

Le Maroc de demain

• Le CSNMD projette un Maroc durable, où les ressources sont préservées, dans tous les territoires : la durabilité des ressources et la protection de la biodiversité sont nécessaires pour faire face aux risques et menaces générés par le changement climatique et par l’activité humaine. Le Royaume est fortement exposé à ces risques et à leurs impacts, notamment à travers les pressions sur les ressources hydriques, l’altération des bases productives de l’agriculture, et d’écosystèmes de biodiversité. Le défi de la durabilité consacre la responsabilité collective envers le capital naturel et le climat, en tant que biens communs, et envers les générations futures. Un Maroc audacieux, leader régional dans des domaines d’avenir ciblés.

Le pays ambitionne de devenir le champion régional de l’énergie à bas carbone.


 

Indices de mesures de la durabilité au Maroc (2019 vs 2035)

Indicateurs de durabilité

2019

2035

% eau dessalée et eaux usées épurées dans la consommation totale de l’eau

0%

15%

Indice de développement locale multidimensionnel

0,7

0,85

% énergie renouvelable dans la consommation totale d’énergie

11%

40%

 

Le NMD préconise d’intégrer dans toutes les matrices de décision une série de principes faisant office de référentiel. Son principe est : soutenabilité et efficience.. Soit l’intégration systématique dans l’action des acteurs de la soutenabilité des ressources et l’efficience des choix de développement. Les contraintes de plus en plus fortes sur les ressources imposent d’intégrer dans l’action les exigences de durabilité environnementale et de soutenabilité financière, à travers un usage raisonné de ces ressources ainsi que leur valorisation et préservation pour les générations actuelles et futures. Cela concerne autant les ressources naturelles que les ressources financières et passe par des décisions sobres et efficientes en termes d’usage des ressources, basé sur une analyse systématique des coûts et bénéfices. S’agissant de la soutenabilité environnementale, l’anticipation des externalités de tout projet sur l’environnement doit être rendue systématique, et l’arbitrage doit se faire en faveur de la préservation des ressources en cas d’externalités négatives fortes. En outre, l’efficience des dépenses publiques doit être régulièrement évaluée.

• Enfin, le NMD préconise 4 axes stratégiques majeurs, à savoir un axe sur l’économie, un sur axe sur le capital humain, un axe sur l’inclusion et la solidarité et surtout un axe sur les territoires et la durabilité. Cet axe est porteur d’une nouvelle vision sur le rôle des territoires et on retrouve une série de choix stratégiques dont 2 affectant directement la résilience au changement climatique.

Préserver les ressources naturelles et renforcer la résilience des territoires au changement climatique

Préserver les ressources en eau à travers une meilleure valorisation de la ressource et une gestion plus rigoureuse de sa rareté pour les générations actuelles et futures.

Enjeux : La durabilité est un socle des choix de développement en ligne avec l’impératif de préservation et valorisation du capital naturel. La Commission considère comme nécessaire de renforcer alors la gouvernance des ressources naturelles et ce en conformité avec le SNDD.

Enjeux : Le Maroc souffre d’un stress hydrique qui ne cesse de s'accentuer, ce qui perturbe l’ensemble des équilibres du pays. Pour cette raison, la question de l’eau se situe parmi les plus urgentes, en intégrant sa rareté et en donnant la primauté à sa préservation à long terme.

• La Commission appelle à consolider le développement de l’agriculture, en intégrant les contraintes à sa durabilité, en insistant sur la reconversion rapide de l’agriculture marocaine en faveur des cultures résilientes aux aléas climatiques et génératrices de forte valeur ajoutée. Cette question de durabilité dépend de l'optimisation des ressources hydriques, privilégiant les cultures développant une sécurité alimentaire nationale et tenant compte des cultures exportatrices les coûts directs et indirects de l’eau pour l'État ; ainsi que la rationalisation de la consommation énergétique agricole en intégrant l’énergie renouvelable dans ce secteur.

• Il est préconisé de
mieux exploiter le potentiel de l’économie verte et l’économie bleue (définition : secteur de l’économie maritime, la World Bank la définit également une économie durable), à travers le développement d’une économie circulaire et d’un cadre légal intégrant le potentiel des filières tel que le cannabis et le chanvre.

• Le Maroc compte aussi
bénéficier de son capital naturel pour renforcer le tourisme national, qui se développera à travers le développement d’une tendance de plus sensible aux impacts environnementaux et aux voyages à faible empreinte carbone. Il faudra alors développer une offre touristique mettant en valeur les richesses culturelles, patrimoniales du pays et valorisant pleinement tous les territoires, ce qui passe par la mobilisation de nombreux secteurs comme l’agriculture (éco-tourisme), la culture (valorisation du patrimoine matériel et immatériel), la santé (tourisme du bien-être) et le sport.

• Enfin, la Commission met l’accent sur la
protection de la biodiversité et des écosystèmes forestiers comme levier essentiel de la politique de durabilité. Cela passe par l’extension du réseau national des aires protégées et la mise en place d’un Programme Forêt, destiné à la restauration des écosystèmes forestiers.

• Il s’agit, en premier lieu, de réformer l’organisation du secteur et de renforcer la transparence sur les coûts de la ressource à chaque étape de sa mobilisation. L’objectif est d’assurer une plus grande transparence du coût de la ressource, en découplant l’eau et le secteur énergétique par une réforme profonde de l’ONEE (Office Nationale de l’Eau et l'Électricité).

• En second lieu, il est préconisé de
mettre en place une tarification qui reflète la valeur réelle de la ressource et incite à la rationalisation des usages et à la gestion de sa rareté. Cela permettra de lutter contre les pertes (fuites, évaporation) et de rationaliser l’usage de l’eau. Cela passera par l’augmentation progressive des tarifs de l’eau à l’ensemble des usagers, particuliers et agriculteurs, pour assurer la rémunération des services de mobilisation. L’Etat couvrira les tranches sociales à revenu faible par des subventions. Il sera également important d’introduire des mécanismes d’incitations à l’économie d’eau à travers des quotas d'irrigation proportionnels à la superficie agricole des exploitations.

• Il s’agira, en troisième lieu, de
mettre en place une Agence Nationale de Gestion de l’Eau (ANGE), remplaçant la Commission Interministérielle de l’Eau, qui allouera les ressources en eau et adaptera sa stratégie de tarification; normes; critères de mobilisation; de prélèvement et d’utilisation qui soient propices à la préservation de la ressource à long terme.

• Enfin, les besoins en eau ne pourront être satisfaits à l’avenir sans la mobilisation des ressources non conventionnelles et sans la préservation des ressources souterraines. Il est nécessaire de
rationaliser l’usage des eaux souterraines, d’augmenter l'approvisionnement en eau grâce à la désalinisation, de libérer des ressources supplémentaires et réduire significativement les pertes d’eau. Les recours envisagés sont alors le traitement, la réutilisation des eaux usées et eaux pluviales.


Critiques du NMD

Ce qui revient très souvent comme critique sur ce nouveau modèle de développement, c’est son manque de retour objectif, critique, sur les mises en œuvre de politiques actuelles qui ont été mises en place, notamment sur des plans comme le PMV ou encore le plan Azure. Le rapport, sert donc de guide stratégique, prospectiviste, mais sa capacité d’analyses des politiques passées reste limitée par ce que certains voient comme de l’auto-censure.




Sources

 Article par Malik Tazi